En 2022, la France est passée d’une réglementation thermique (RT2012) à une réglementation environnementale nommée RE2020. Dorénavant, les constructions neuves ne seront plus évaluées uniquement sur des critères de performance énergétique mais également sur des critères d’impact environnemental, notamment l’émission de CO2 durant l’ensemble du cycle de vie.
Après 5 années d’expérimentation de la nouvelle méthodologie d’évaluation Energie-Carbone, la RE2020 a été déployée pour les bâtiments résidentiels le 1er janvier 2022 et pour les bâtiments de bureaux et d’enseignement depuis le 1er juillet 2022.
La RE2020 vise 3 objectifs :
- Renforcer la sobriété énergétique et la décarbonation de l’énergie
- Diminuer l’impact carbone de la construction
- Garantir le confort d’été
Des nouveautés par rapport à la RT2012
La RE2020 s’appuie d’une part sur l’ancienne RT2012 (coefficient de consommation en énergie primaire Cep, indicateur bioclimatique Bbio) avec plus d’exigence, mais introduit également des nouveautés :
- Le Cep,nr : coefficient de consommation en énergie primaire non renouvelable, avec un seuil maximum à ne pas dépasser
- IC énergie : impact sur le changement climatique associé aux consommations d’énergie primaire en kg eqCO2/m2
- IC Construction : impact sur le changement climatique associé aux « composants » + « chantier » en kg eqCO2/m2
- DH : degré-heure d’inconfort : niveau d’inconfort perçu par les occupants sur l’ensemble de la saison chaude
Volet énergie de la RE2020
Sur le volet énergie, les exigences de conception bioclimatique (Bbio) sont renforcées de 30 % par rapport à la RT2012 ce qui nécessitera notamment une isolation renforcée du bâti et une quasi-disparition des ponts thermiques.
Encourager les énergies renouvelables
Désormais, afin d’avoir une vision plus large, les 5 postes réglementaires (chauffage, eau chaude sanitaire, ventilation, éclairage et auxiliaires de distribution) sont complétés par les consommations d’électricité des parties collectives (ascenseurs, éclairage et ventilation des parking, etc.). En parallèle, un nouvel indicateur prenant en compte uniquement les consommations d’énergie d’origine non renouvelable (Cep, nr) a été créé, obligeant en quelque sorte à intégrer des énergies renouvelables dans tout nouveau projet.
Garantir la prise en compte du confort d’été
L’une des nouveautés est qu’en cas d’inconfort d’été constaté, le moteur de calcul prendra en compte des consommations de climatisation « fictive », donnant ainsi un rôle central à la gestion des protections solaires. Sujet à de nombreux débats, le coefficient de conversion de l’électricité passe de 2,58 à 2,30, favorisant cette énergie dans le calcul. Les seuils réglementaires d’émissions de CO2 liées à la consommation énergie des bâtiments résidentiels sont ambitieux, ce qui a pour conséquence que l’usage des énergies fossiles et notamment le gaz ne sera plus possible dès 2022 pour les maisons individuelles et 2025 pour les logements collectifs. Les réseaux de chaleurs auront jusqu’en 2028 pour verdir leur mixte énergétique.
Pour en savoir plus et observer une simulation sur un même bâtiment, rendez-vous dans le n°92 !
Volet carbone de la RE2020
Sur le volet carbone, l’état encourage les donneurs d’ordre à intégrer massivement les matériaux bois et biosourcés dans l’optique de rendre compatible la nouvelle RE2020 avec la stratégie nationale bas-carbone (SNBC). Ainsi, les seuils carbone seront renforcés tous les 3 ans. Toutefois, le retour d’expérience de l’expérimentation Energie-Carbone a conduit à quelques adaptations à savoir :
- Les études ACV seront réalisées de façon dynamique afin de considérer la temporalité des émissions et les effets de stockage carbone
- Le lot infrastructure sera limité à 40 kgCO2/m² pour prendre en compte les contraintes liées à la nature du sol défavorable
- Le facteur d’émission de l’électricité passera de 210 à 79 gCO2/kWh
Finalement, les seuils carbone exigés pour les bâtiments résidentiels seront proches du niveau Carbone 1 de l’Energie-Carbone.
Volet confort d’été de la RE2020
Sur le volet confort d’été, la méthodologie fait peau neuve. Il s’agit désormais de calculer le nombre d’heures cumulées (DH) où la température intérieure dépasse 30°C le jour et 28°C la nuit. En dessous de 350 DH, le bâtiment est totalement adapté aux périodes de fortes chaleurs. Au-dessus de 1250 DH, le bâtiment n’est plus conforme. Entre ces deux valeurs, des pénalités s’appliqueront sur le calcul de la performance énergétique.
Pour en savoir plus sur le confort d’été en RE2020 rendez-vous dans le n°90 !
En savoir plus
UNE PRISE EN COMPTE DANS LE BBIO
La prise en compte du confort d’été est déjà visible dans le calcul du Bbio, toujours sans unité, mais exprimé par m², qui traduit la bonne conception et la performance du bâti : Bbio = (2 x besoins de chauffage) + (2 x besoins de froid) + (5 x besoin d’éclairage). Améliorer le Bbio passe donc déjà par un travail sur l’enveloppe, l’isolation, la qualité thermique, l’inertie, la compacité, l’orientation, les protections solaires et bien sûr l’éclairage naturel (coefficient 5). Rappelons que ce Bbio doit être inférieur à Bbio_max, lui-même impacté par un bbio_max moyen variable selon la typologie de bâtiment, l’aménagement ou non des combles, la surface pour les logements collectifs et les zones de bruit. (Voir notre article sur la RT2012)
L’INDICATEUR DEGRÉS-HEURES
Le scénario de la RE2020 repose sur de nouvelles données météo (de janvier 2000 à décembre 2018) et intègre une séquence caniculaire en se référant à celle de 2003 pour le calcul de l’inconfort d’été. L’indicateur Degrés-heure (DH) est la différence entre la température du bâtiment (appelée température opérative du groupe) et la température de confort adaptatif. En effet, au bout de quelques jours de surchauffe, notre corps s’adapte et nous ressentons le même inconfort à 28° C le jour qu’à 26 °C la nuit. L’indicateur DH prend donc en compte les conditions climatiques des journées passées, il permet de proposer un niveau de confort relatif et donc plus proche de ce qui est effectivement ressenti par les habitants.
Le DH final est un cumul de chaque Degrés-heures inconfortables sur l’année. Plus concrètement, cet indicateur s’apparente à un compteur qui cumule, sur l’année, chaque degré ressenti inconfortable de chaque heure.
DES MODULATIONS
Afin d’être plus proche de la réalité, un scénario d’occupation a été intégré aux calculs. Il est décidé par convention qu’un logement est inoccupé de 9h à 17h30 du lundi au vendredi, sauf le mercredi après-midi. Durant cette période d’inoccupation les Degrés-heures ne sont pas pris en compte. Les bâtiments climatisés sont étudiés hors climatisation.
DES SEUILS
La RE2020 définit un seuil haut, au-delà duquel le bâtiment n’est pas réglementaire, un seuil réglementaire qui assure le confort d’été. Entre les deux seuils, on considère qu’il faudra sans doute installer un jour une climatisation, ce qui va se traduire par une pénalisation forfaitaire du Cep. En quelques sortes, on évalue une consommation de froid fictive.
En maison individuelle, un DH de plus de 1250°C.h sera non réglementaire (soit un dépassement de 2 degrés de la température de confort pendant 25 jours complets).
Le seuil bas est à 350°C.h (soit un dépassement de 2 degrés pendant 7 jours). Une exception est faite pour les maisons classées en catégorie 2, considérées comme pénalisées par leur situation : c’est par exemple des fenêtres de logements climatisés que l’on ne pourra pas ouvrir à cause du bruit (zone BR2 ou BR3) situés en zones H2d ou H3 (PACA) et à une altitude inférieure à 400 m. Pour cette catégorie 2, le seuil haut est porté à 1850°C.h. En logement collectif, s’ajoutent d’autres modulation comme la surface du logement ou la présence ou non de zone traversante (plus facile à ventiler).
Le bois et la RE2020
L’ACV dynamique
Concernant l’impact carbone de l’énergie, celui-ci passe de 210 g à 79 g pour l’électricité du réseau (-62 %), et reste à 24 g ou 30 g pour la biomasse à comparer avec des valeurs de 227 g et 324 g pour les énergies fossiles. Le bois, comme source d’énergie individuelle ou utilisé dans un réseau de chaleur, est considéré comme 100 % renouvelable. La biomasse est bien valorisée avec un impact 2 fois moins important en CO2 sur l’indicateur IC énergie.
Le calcul de l’impact du bâtiment est calculé par un logiciel d’ACV (Analyse de Cycle de Vie) sur une durée de vie de 50 ans en additionnant les impacts sur l’ensemble de la vie de chaque composant issus de sa FDES (conception, construction, exploitation, fin de vie) et multipliés par les données quantitatives du projet (métrés, quantités, cubages…). Ceci pour calculer l’impact total du bâtiment sur le réchauffement climatique, le but étant de réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES), d’évaluer son empreinte carbone et de valoriser l’utilisation de matériaux biosourcés.
La RE2020 considère que plus l’émission de CO2 est tardive, moins elle aura d’impact sur les 50 ans du cycle de vie. Ceci favorise les matériaux biosourcés qui libèrent en fin de vie le carbone stocké pendant leur phase de croissance. Ce stockage temporaire est valorisé. Ainsi, une poutre en bois massif qui aurait un impact de 700 kgeqCO2 avec une ACV statique, verra son impact réduit à seulement 400 kgeqCO2 en ACV dynamique.
En RT2012, on considère qu’un bâtiment émet environ 1 t/m2 eqCO2 : il faudra l’abaisser de 26 % dès aujourd’hui et de 50 % en 2031.
Les biosourcés : réduire le poids carbone des constructions
Pour autant le bois ne résoudra pas tout ! En effet, 55 % des émissions de CO2 sont dues aux lots des fondations, infrastructures, superstructures et maçonnerie… Mais l’impact d’une poutre en lamellé-collé de 7 m est 5 à 6 fois moindre que son équivalent en béton ou en acier sur 50 ans (en ACV statique). Une comparaison de 100 m2 d’isolants biosourcés et conventionnels sur un projet donné permet de bien visualiser l’intérêt de la fibre de bois ou de la paille par rapport au polyuréthane ou au verre cellulaire par exemple.
Enfin, si l’on compare les murs ossature bois/ brique / béton armé, en ACV dynamique, l’impact du mur bois est de 30 à 70 fois moins important que celui de son équivalent en béton armé, malgré son relargage envisagé en fin de vie.
Le bois : d’autres atouts
Outre l’effet de stockage temporaire de carbone, rappelons que les aspects « filière sèche » et « haut degré de préfabrication » réduisent le temps de chantier et le nombre de rotations des livraisons et limitent la production de déchets. De même, la structure bois étant plus légère, elle nécessite parfois des fondations moins lourdes et généralement des camions moins imposants, ce qui allègera le poids carbone du chantier.
Retrouvez l’article complet “Construction bois et RE2020” dans notre n°89 !