Photos : Aquatiris
Le succès du « tout à l’égout » a changé le confort des villes. Mais le problème de salubrité n’a été que déplacé un peu plus loin, en rejetant les eaux usées dans les fleuves. L’assainissement est ainsi devenu peu à peu une priorité environnementale, traitée avec la création de stations d’épuration, coûteuses pour les collectivités. L’assainissement par les plantes ou phytoépuration est une alternative intéressante, à envisager, aussi bien pour un projet de construction que dans un contexte de réhabilitation. C’est un système écologique, autonome, esthétique, efficace et innovant qui présente un coût équivalent à une installation classique. Découverte de ce processus avec la société spécialisée Aquatiris, dont les filières fonctionnent aussi bien avec les toilettes sèches que les toilettes à eau.
À quoi sert l’assainissement ?
Nous produisons tous des eaux usées, que ce soit dans la cuisine (eaux graisseuses), la salle de bain et le lave-linge (eaux grises) ou dans les toilettes à chasse d’eau (eaux vannes). Rappelons qu’avant d’assainir nos effluents, il est important de réduire les pollutions à la source : utiliser des produits respectueux de l’environnement, idéalement passer aux toilettes sèches… L’assainissement a deux fonctions principales : améliorer la salubrité d’une part et protéger le milieu naturel d’autre part.
Assainissement avec les plantes
L’assainissement dit autonome, usurpe bien souvent le terme « autonome » puisqu’en fait, il engendre des boues (résidus non solubles issus de l’activité biologique des bactéries qui épurent les eaux usées). La collecte et le traitement de ces boues constituent un problème pour les collectivités. Toutefois, la phytoépuration, à ne pas confondre avec la technique du lagunage, apporte une alternative écologique intéressante en produisant, non des boues, mais du compost, valorisable.
Jusqu’à présent la réalisation d’un projet d’assainissement avec les plantes était autorisée à titre expérimental par les mairies.
Depuis septembre 2009, les Ministères de la Santé et de l’Environnement donnent la possibilité à de nouveaux systèmes d’assainissement d’obtenir un agrément, et ce à l’issue d’un suivi d’analyses pendant une année.
Le suivi réalisé par le CSTB sur la filière « Toilettes à eau » d’Aquatiris s’est terminé en mars 2011.
Filtres plantés pour l’assainissement individuel
La phytoépuration consiste à épurer les eaux usées par un passage dans plusieurs bassins filtrants successifs. Ces bassins étanches sont remplis par un substrat et plantés de végétaux adaptés.
Dans les filtres plantés, des conditions optimales sont constituées pour obtenir une activité biologique maximale et donc de bonnes conditions épuratoires. Peu gourmande en surface cette technique est autant adaptée au petit assainissement collectif qu’à l’assainissement individuel. Le processus de compostage transforme nos déchets en terreau, dont les propriétés sont similaires à celles du terreau forestier. Il n’est pas malodorant. Il est utilisable au jardin d’ornement. De plus, les eaux usées efficacement épurées constituent un potentiel valorisable au jardin.
Le substrat
Le rôle de ce substrat est prépondérant dans l’épuration et permet le développement du végétal. Les substrats peuvent être des massifs reconstitués (granulats roulés de rivières ou granulats concassés), les massifs naturels (si la perméabilité, la texture, la structure et l’hydromorphie du sol le permettent) ou en eau libre (masse d’eau en contact direct avec l’atmosphère, avec végétaux).
Le rôle du végétal
Les plantes n’assurent pas directement le processus d’épuration, c’est toujours le résultat d’une activité bactérienne, quel que soit le dispositif d’assainissement. Les bactéries se fixent sur le substrat composé de sables/graviers et sont nourries des eaux usées. Elles consomment la matière carbonée ainsi que des nutriments et de l’oxygène et rejettent du dioxyde de carbone et de la vapeur d’eau (processus de respiration). Le rôle des plantes est d’améliorer le substrat grâce à la rhizosphère (ensemble des tiges souterraines et des racines), offrant ainsi des conditions épuratoires optimales. Grâce à ces processus efficaces et aérobies, les rejets en fin de filière sont incolores et inodores, et sont valorisables. Ceci permet d’infiltrer les rejets tout en les valorisant. On utilise ici des roseaux, dont la morphologie permet une bonne prise au vent grâce aux plumeaux en panache. Le mouvement transmis aux tiges des roseaux, puis aux tiges souterraines (rhizomes) assure ainsi un rôle mécanique anticolmatant, qui empêche la formation d’un biofilm.
« Les jardins d’assainissement® » d’Aquatiris
La technique comporte 3 phases, un pré-taitement (étape non nécessaire en cas de toilettes sèches), un traitement et un exutoire.
Le prétraitement
Le prétraitement consiste à séparer les matières solides des matières liquides. C’est principalement l’utilisation de toilettes à eau qui impose cette phase de traitement. En phytoépuration, on supprime la fosse au profit d’un filtre planté de roseaux à écoulement vertical. Les matières sont retenues en surface du filtre, tandis que les eaux percolent verticalement au travers du filtre. Dans ce cas il n’y a ni fosse ni bac dégraisseur. Le filtre vertical est rempli de couches successives de graviers et de sable dont la granulométrie favorise l’écoulement.
Ce type de filtre effectue le traitement primaire (pré-traitement) avec la filtration, et le traitement secondaire (appelé également traitement biologique aérobie) avec cultures de micro-organismes fixées sur les granulats.
Il n’y a pas de production de boue mais de compost. C’est le résultat de la dégradation des matières organiques retenues à la surface des filtres plantés qui se dégradent lentement à l’aire libre. Le compost doit être retiré environ tous les 10 ans, utilisable au jardin d’ornement. Il n’y a pas d’odeur. Le filtre vertical est cloisonné en 2 parties, un seul côté est alimenté à la fois, d’où une manœuvre une fois par semaine pour changer de côté. Le filtre vertical est très performant : à lui seul il permet d’atteindre des valeurs proches, voire déjà en dessous des valeurs seuils de pollution.
Le traitement
Le traitement s’effectue au sein des filtres plantés qui peuvent être assimilés à des sols reconstitués dans lesquels des plantes sont installées.
Le traitement commence dans le filtre à écoulement vertical en milieu aérobie et se poursuit dans le filtre planté à écoulement horizontal. Dans ce dernier, les eaux circulent horizontalement par effet piston à la manière d’une nappe phréatique, sous la surface du substrat. De ce fait y est présente une mosaïque de zones aérobies et anaérobies. Une dégradation lente effectue la finition du traitement des matières organiques en solution. Il se vide par trop plein, et est donc toujours rempli d’eau sans que celle-ci ne soit affleurante. De nombreuses espèces y sont plantées : massettes, iris des marais, salicaires, rubaniers, scirpes, menthes aquatiques, plantains d’eau… Elles absorbent pour leur métabolisme une partie des nitrates et des phosphates. Le filtre planté à écoulement horizontal participe au traitement secondaire tertiaire et quaternaire.
La sortie : l’exutoire
En sortie de traitement, il faut faciliter la pénétration des eaux propres dans la terre : c’est le rôle de l’exutoire. Ce processus de ré-infiltration de l’eau peut se réaliser de différentes manières, et est conçu dans un souci d’intégration paysagère : mare, noue ou fossé, et pourquoi pas rigoles d’irrigation. C’est la phase finale d’infiltration qui joue un rôle double puisqu’en cas de pluviométrie exceptionnelle, ou de surcharges polluantes, l’exutoire continue le traitement et contribue à améliorer la qualité des eaux. L’exutoire est également planté d’espèces semi-aquatiques ou, si un plan d’irrigation est choisi, il peut servir à arroser gratuitement et automatiquement un massif de rosiers ou autres plantes ornementales. C’est en quelque sorte la « cerise sur le gâteau » : les eaux traitées sont valorisables et utiles à bien des usages jardiniers.
La visibilité et l’accessibilité des filières plantées en facilitent le contrôle et l’entretien. Mais se pose la question, dans le cas des installations autonomes, des risques sanitaires liés à l’accessibilité aux effluents. Pour éviter le contact accidentel entre l’usager et ses effluents, Aquatiris propose la mise en place d’une clôture pour protéger l’accès à la filière ou d’une grille au-dessus du filtre vertical.
Les coûts
A l’installation, le coût est à peu près identique à une filière filtre à sable. C’est dans le temps que la filière plantée est réellement économique car véritablement autonome (pas d’entreprise de vidange, pas de retraitement des sables à prévoir) et d’une tenue dans le temps inégalée ! On peut trouver en Angleterre des filières datant de 60 ans et toujours en état de marche ! Si vous faites exécuter les travaux par un entrepreneur spécialisé, comptez environ 7 000 à 10 000 € TTC suivant la taille de la filière, l’accessibilité du chantier et l’utilisation d’une pompe ou non.
La véritable filière économique est celle utilisant les toilettes sèches. Dans ce cas on peut réduire le coût d’environ 4 000 à 5 000 € TTC.
Entretien
En période hivernale l’apport d’eau tout au long de la journée limite le gel. De plus s’il y a gel il est seulement en surface des filtres plantés : sous la surface la vie bactérienne continue. Les plantes aquatiques installées résistent très bien au gel. Pour protéger la surface du filtre planté, il est conseillé de ne faucarder les parties végétales sèches qu’en fin d’hiver (fin février, début mars) pour laisser un couvert végétal.
Pour en savoir plus lire notre article consacré au nouveau filtre planté Carex dans le n°93